D’où me vient cette familiarité presque filiale avant d’être littéraire avec Aminata Sow Fall? Quelques éléments de réponse personnels apparaissent. Elle est née deux mois après ma maman, la même année. Elles portent le même prénom et ont sensiblement eu le même parcours professionnel.
Elles manient toutes deux le français avec une dextérité et une élégance que bien des intellectuels proclamés leur envieraient. Toutes deux sont profondément ancrées dans leur culture qu’elles défendent avec talent et conviction.
Elles ont même physiquement une allure similaire, se distinguant par le teint, l’une à la peau de velours sombre des wolofs, l’autre au teint d’ambre des haal pulaars.
Quand nous nous sommes rencontrées la première fois au Salon du Livre du lycée Mermoz, nous nous sommes reconnues et l’humilité de la merveilleuse personne qu’est Aminata Sow Fall a fait le reste.
Plusieurs rencontres depuis lors nous ont réunies ici et ailleurs et toujours le même fluide magique qui émane de son regard et de ses paroles. Ce fluide même qui, par sa plume, me convainquit plus tard d’essayer de créer des romans.
La grève des bàttu et le revenant furent pendant longtemps mes modèles, par leur originalité, leur poésie, leur caractère inclassable. Des œuvres uniques, que le pathos ne dénature pas malgré la violence et dont les valeurs ne sont pas des ornements mais des fondamentaux.
À bien des égards, Aminata Sow Fall représente pour moi la calebasse, objet magique par excellence, symbole de fécondité, de spiritualité, de générosité. Car, elle est tout cela à la fois, Aminata Sow Fall. Comme la calebasse, elle a l’air fragile, pourtant elle sait avoir la résistance du bois et durer.
Comme la calebasse, élément incontournable du balafon, il émane de notre romancière une musique africaine typique.
Comme la calebasse, elle prend racine dans les profondeurs de la terre africaine et nourrit ses écrits de nutriments à nuls autres pareils.
Aminata Sow Fall a la générosité de la calebasse, dont tout est comestible et dont le fruit séché est un ustensile de cuisine incontournable en Afrique.
Par ses romans, elle nous offre à boire, à manger et à nous soigner. N’est ce pas elle qui réalise, sans écartellement inutile, « l’équilibre parfait grâce à la transmission intelligente, humaine, et clairvoyante des valeurs essentielles de la tradition? »
Comme la calebasse, Aminata Sow Fall possède une place unique dans nos imaginaires qu’elle a contribué à forger.
Un immense sentiment de reconnaissance m’anime parce qu’elle inspire chacun de mes écrits, parce qu’elle est vraie, parce qu’elle est libre, parce qu’elle est authentique, parce qu’elle est puissante.
Joyeux anniversaire, Maman Aminata !
Pour tes quatre fois vingt ans, je t’envoie des calebassées de vœux et des brassées de roses!
Fatimata Diallo Ba