À la croisée des savoirs et des sensibilités, Bity Gaye Kébé déploie une écriture qui transcende la simple orfèvrerie du langage pour s’ériger en un véritable dispositif de résurgence existentielle. Enseignante, formatrice, conseillère pédagogique et animatrice culturelle, elle façonne, module et propulse la parole au-delà du cadre académique, insufflant à l’acte d’écrire une dimension quasi-initiatique. Sa plume, mouvante et polysémique, s’apparente à une alchimie où la poésie ne se déclame pas : elle advient, se manifeste, s’impose comme une nécessité ontologique. 

« Mes vicissitudes » : Une Cartographie Poétique de l’Être

Avec Mes vicissitudes, Bity Gaye Kébé ne cède à aucune complaisance formelle : son écriture est un surgissement, un arrachement, une effraction dans l’ordre figé du langage. L’incipit ne se contente pas d’inaugurer un recueil ; il est le seuil d’une libération où la parole, jusqu’alors contenue, explose en un feu prométhéen, embrasant les résistances, déliant la langue, déchaînant le verbe dans une célébration jubilatoire de l’acte poétique. 

Dans ce texte, l’autrice se refuse à être simplement une instance créatrice extérieure à son œuvre : elle se fait texte, devient poésie, s’incorpore à la matière même du langage pour en extraire une essence à la fois charnelle et métaphysique. L’intertextualité y est souveraine, la tautologie recherchée, non comme redondance gratuite, mais comme insistance signifiante, une manière d’emplir le texte de résonances infinies, où chaque écho lexical se prolonge en une polysémie vertigineuse. 

Dans un cycle de trente jours et trente nuits, la poétesse sculpte une parole qui éclaire et consume, balisant un parcours où chaque mot, chaque vers, se dresse en totem du sens. Elle enroule son texte autour d’un fil d’Ariane métaphorique, dans un dialogue souterrain avec la mythologie, offrant au lecteur un labyrinthe où se perdre revient à mieux s’y retrouver. Elle tisse une laine métisse mais lisse, glissant dans le dédale de l’âme, invoquant les figures de Minos et Pasiphaé comme allégories des contradictions humaines, des ombres à apprivoiser pour toucher à la lumière du langage. 

Ainsi, Mes vicissitudes n’est pas un simple recueil : il est une cosmogonie poétique, un espace où la parole devient substance, une incantation où la poésie s’offre comme un territoire absolu, un lieu d’élévation et de révélation. Lire Bity Gaye Kébé, c’est consentir à être traversé par une parole qui ne se donne pas, mais qui s’impose, irréductible et lumineuse.