
Par Paul Wil-Adémon Kwadjané Agoubli
Le Salon International du Livre d’Abidjan vient de refermer ses portes. L’édition 15 a été sans conteste l’une des plus compliquées à réaliser eu égard à la démultiplication des écueils auxquels a dû faire face le comité d’organisation.
Bien sûr les exposants ont raison, vu le contrat qui les lie aux organisateurs, de récriminer quand on regarde l’inconfort manifeste dans lequel ils ont été installés l’essentiel du temps. Toutefois, il faut savoir que courant mars-avril, alors que le Sila est inscrit à l’agenda mondial des foires et Salons, on a sollicité du Commissaire général le changement de la date parce que le PEA était pris. Comment cela aurait-il pu se faire alors que le prochain Sila est toujours annoncé à la fin du précédent, date et lieu compris ?
Contraint de maintenir la date et le lieu (?), le Commissariat général a dû improviser. S’il prend pour lui les effets des problèmes techniques, on ne peut valablement pas l’accuser des défaillances matérielles qui ne sont pas de son fait pas plus que des problèmes de circulation dans la ville d’Abidjan qui compliquent désormais l’accès à la zone aéroportuaire à proximité de laquelle l’événement était logé.
Ceux qui se plaignent à n’en pas finir malgré la démultiplication des mots d’excuse ont-ils déjà ouvert le budget du ministère de la culture et de la Francophonie pour en connaître la cagnotte ? À combien évaluent-ils la subvention au Sila dont le nombre de visiteurs surclasse tout ce qui se fait dans notre région ? Ont-ils une idée du coût du Salon et du miracle opéré chaque année pour le tenir avec des dettes innombrables qu’on n’a pas fini d’éponger un an après l’activité ?
La critique est aisée, mais l’art est difficile. La formule ne ment pas. Comment les mêmes personnes qui ont réussi l’édition précédente peuvent-elles délibérément se saborder la fois suivante ?
Nul ne conteste le droit à la critique de chacun. Fervent républicain moi-même, j’en suis le premier défenseur ; et c’est précisément au nom de la liberté d’expression valant pour les uns comme pour les autres que je crois devoir appeler l’attention de tous sur le cas que nous faisons du livre extrêmement ghettoïsé dans une société qui s’émeut d’un Salon du livre « raté » – si je devais reprendre la critique – mais aucunement de la marginalisation de toute l’industrie du livre 365 jours sur 365.
De Salon raté, il n’en a rien été au final. Oui, de nombreux dysfonctionnements ont été enregistrés qui ne peuvent être niés mais s’acharner sur une organisation qui a passé 5 jours à rattraper les défaillances techniques dues aux équipements et au fait qu’elle n’a disposé que d’une fourniture résiduelle du courant électrique disponible au Parc, c’est comme l’aurait dit Césaire, « penser à son aise mais hors du monde. »
Pour avoir vécu l’organisation du Sila en tant que chargé d’études et chef de la communication au ministère de la Culture et pour y participer aujourd’hui en tant que directeur scientifique de l’événement, je m’amuse de la facilité avec laquelle les experts en tout parlent de ce qu’ils ne savent pas haut-perchés sur leurs certitudes de toujours.
Cette année, sollicité par le Commissaire général combien de courriers, de notes d’intention, de mémos n’ai-je pas rédigé à on-ne-sait-plus quel nombre d’organismes publics et privés pour obtenir des moyens supplémentaires pour le Sila ? Je salue l’effort fait sur le budget de l’État et la promesse de faire un peu plus l’année prochaine.
Au final, j’interroge le but des admnonestations. Que veut-on : qu’on change les organisateurs du Salon sinon qu’ils se flagellent place publique ? Témoin de l’organisation depuis la reprise (après la crise de 2011) jusqu’à ce jour, je souhaite bien du plaisir à ceux qui pourraient faire preuve d’autant de résilience que Anges-Félix N’Dakpri. Je serais lui, je laisserais les experts s’y coller et nous jugerions.
P.S.: Je salue la critique, quelle qu’elle soit. J’y ai simplement répondu à mon tour.