Par Diagne Fodé Roland


Ngugi Wa Thiong’o nous a quitté ce 28 mai 25 pour son repos éternel. Ecrivain kenyan qui a été emprisonné au Kenyan pour avoir écrit en langue Kikuyu et fait jouer des pièces de théâtre engagées aux ouvriers et paysans avant d’être contraint à l’exil. Il a été un précurseur des écrits littéraires dans les langues africaines, notamment sa langue maternelle.

La Maison d’édition Présence Africaine lui a rendu un vibrant hommage après avoir publié ses œuvres « Pétales de sang, 1985 (Petals of Blood, 1977) », « La Rivière de vie, 2000, (The River Between, 1965) », « Les Neuf Parfaites : L’épopée de Gĩkũyũ et Mũmbi, 2023, (The Perfect Nine: The Epic of Gĩkũyũ and Mũmbi, 2020), une relecture de la mythologie Gikuyu ». Honte aux États néocoloniaux africains qui ne font rien pour que Présence Africaine retrouve ses heures d’utilité publique et de gloires de la période de son fondateur Alioune Diop.

Ngugi wa Thiong’o est l’une des figures littéraires les plus importantes d’Afrique et un théoricien majeur critique du néocolonialisme post-colonialisme. Ce géant littéraire a consacré aux combats de la renaissance africaine contre le néocolonialisme dominant ainsi que la revalorisation des langues des nationalités africaines. Il a œuvré à « décoloniser l’esprit » titre d’un de ses opuscules que tout Africain devrait lire. Il laisse un immense héritage à la jeunesse artistique littéraire militante de l’actuelle seconde phase de la libération anti-néocoloniale africaine.

Lors d’une table ronde organisée par le Parti Communiste Sud Africain (PCSA), voilà quelques morceaux choisis des réponses de Ngugi Wa Thiong’o :

– Sur le rapport entre littérature et engagement : «  Le Kenya moderne est le produit de deux processus dialectiques opposés : celui de l’impérialisme ou de la domination impérialiste et celui de la résistance à la domination, c’est-à-dire le mouvement de libération nationale. Comme tu le sais, le Kenya fut intégré dans le système impérialiste britannique vers 1888, d’abord propriété d’une compagnie, puis comme colonie de peuplement. Cela signifie que la terre a été prise par la force au peuple pour être donnée à une minorité de colons blancs. Le paysan kenyan travaille sur cette même terre qui lui a été volée. Les gens payèrent aussi des taxes ce qui a permis la construction d’une activité économique réelle. Ainsi notre travail, notre capital, notre terre, tout a contribué au développement de l’économie coloniale. Cela fut permis grâce à la conquête militaire et à la domination et la répression politiques qui ont suivi. Mais la domination et l’oppression culturelles furent nécessaires au contrôle politique et économique. Chansons, poésies, danses, langues, enseignement furent attaqués et souvent violemment supprimés. L’impérialisme britannique a pris pour nous la forme concrète de l’occupation coloniale économique, politique et culturelle. La racisme est devenu l’idéologie dirigeante dominante. Mais l’autre processus, le plus important pour la construction du Kenya moderne, fut celui de la résistance nationale. Ainsi, l’occupation britannique du Kenya, à la fin du 19ème siècle, rencontra la résistance du peuple kenyan des différentes nationalités. Cette résistance s’est poursuivie dans les années 1920, 1930, 1940 et 1950, prenant différentes formes, mais avec un caractère de lutte de libération nationale influencée par l’intervention de la classe ouvrière en développement. Le point culminant de cette résistance anti-coloniale fut le mouvement Mau-Mau ou l’Armée pour la terre et la liberté du Kenya, dirigée par Dedan Kimathi, et qui mena la lutte armée contre l’occupant colonial de 1952 à 1962. Je suis allé à l’école pendant cette période de lutte intense. Certains de mes parents combattaient aux côtés de l’Armée pour la terre et la liberté du Kenya, mais d’autres comme collaborateurs loyalistes du colonialisme britannique. Dans une période de lutte politique exacerbée, les liens traditionnels du sang et de la région sont déchirés et ce fut le cas de Limuru et du Kenya qui m’ont vu grandir. Et en aucune manière cela n’aurait pu se faire sans laisser de traces dans ma vie. Et donc, quel est le lien entre la littérature et cette expérience, du moins dans mon cas ? Il est évident que la littérature anglaise, la littérature formelle que j’ai lue dans les écoles et les collèges, ne parlait pas de l’expérience que nous vivions au Kenya. En étudiant la littérature anglaise, je vivais dans un mode en trompe-l’œil par rapport à mon environnement immédiat. Non que la littérature anglaise était entièrement inutile. Tu vois, cette littérature a deux traditions. l’une exprime la culture de lutte, la culture de la classe ouvrière, les aspirations démocratiques à un changement et à un vie meilleure dans une société meilleure, l’autre exprime des sentiments réactionnaires anti-peuple, avec une stagnation et une décadence, plus que la lutte sociale considérée comme davantage en harmonie avec la condition humaine. Une partie de cette littérature. particulièrement lorsqu’elle décrit les gens des colonies, devient carrément raciste et anti-humaine. Mais pour moi-même, la littérature qui révèle les sentiments démocratiques pour le changement a fait de l’expérience de l’histoire britannique et européenne son cadre de référence. La découverte de la littérature africaine et caribéenne fut pour moi une redécouverte du monde qui m’entourait, un monde de lutte active, un monde résonnant des exigences du changement. La trahison, le mensonge, mais aussi l’héroïsme et la gloire – ces thèmes du théâtre de ma vie quotidienne – étaient distillés dans la littérature que j’avais découverte. J’étais venu d’un monde où les travailleurs ordinaires – les paysans et les ouvriers de Limuru – avaient atteint des sommets de gloire dans leur lutte contre le géant colonial et cela allait être confirmé dans les mots et les images des nouveaux écrivains. En bref, cette littérature africaine était largement anti-impérialiste et clairement en harmonie avec les valeurs qui avaient conduit des milliers de paysans dans les forêts et les montagnes pour chasser l’ennemi colonialiste britannique de leur terre ».

Et la culture est un produit des luttes jumelles contre la nature et contre d’autres hommes pour assurer la survie. Mais si la culture est un produit de notre histoire – c’est-à-dire qu’elle évolue historiquement- elle reflète aussi cette histoire et tout le système de valeurs né de cette histoire. Maintenant, dans une situation où une classe ou une nation en domine une autre économiquement et politiquement, la culture et le système de valeurs nés de cette situation sont eux-mêmes conditionnés par la classe et porteront les marques de la domination et de l’oppression. Mais aussi, les marques de la résistance. En d’autres termes, dans un monde de nations et de classes opprimantes d’un côté et de classes et de nations opprimées de l’autre, la littérature et la culture émergentes reflètent la lutte intense entre nations et classes. Il y a deux types de valeurs ou idées inhérentes à cette situation : celles du côté de la domination et de la répression et celles de la résistance. Aujourd’hui, toute littérature née de cette situation exprimera et reflétera une idée qui est plus proche ou de la nation et de la classe opprimantes, ou de la nation et de la classe combattantes. Et dans ce sens, aucune littérature et aucun écrivain ne peut échapper à la prise de position dans les luttes sociales de notre temps. Un écrivain peut bien sûr prétendre qu’il ou qu’elle ne prend pas partie, mais quel que soit le degré de conscience de ses intentions, ce que livrera sa plume n’y échappera pas. En second lieu, l’écrivain lui-même, en tant qu’être humain, vit dans une société de classes et qu’il le veuille ou non, il est lui-même conditionné par la position qu’il ou elle occupe dans la société. Sa propre pensée est déjà affectée par son éducation de classe et sa conscience, ses sympathies ou habitudes de classe conscientes ou inconscientes, Une fois de plus, la littérature qu’il ou elle produit sera affectée par ses habitudes de pensée et de pratique de classe, conditionnée, et donc prendra partie dans la lutte sociale entre classes et nations ou bien dans notre monde d’aujourd’hui, dans la lutte mondiale contre l’impérialisme. La littérature devient une arme de lutte encore plus efficace quand un écrivain est conscient ou a connaissance des idéologies de lutte dans le monde. Bien sûr, la littérature est une arme puissante. Je crois que nous, en Afrique ou ailleurs, pour cette mission, nous devons utiliser délibérément et consciemment la littérature comme une arme de lutte de deux manières : d’abord, en essayant autant que possible de refléter correctement le monde de lutte dans toute sa réalité, et deuxièmement en mettant toute notre sympathie du côté de ces forces qui luttent contre l’oppression nationale et de classe, contre, disons, tout le système de l’impérialisme dans le monde aujourd’hui. Je crois que plus un écrivain est conscient des forces sociales en œuvre dans sa société et dans le monde, plus il a de chances d’être efficace en tant qu’écrivain. Nous les écrivains nous rejetons l’image bourgeoise de l’écrivain génie au-dessus de tout ».

– Sur la reconnaissance sociale et internationale de l’artiste : « La nature de la lutte contre l’impérialisme change tout le temps, vu que l’impérialisme change ses formes et ses caractéristiques suivant le lieu et la période. L’écrivain doit avoir conscience des conditions de changement et agir en conséquence. Dans les années 1950, et avant, le peuple kenyan combattait contre la phase coloniale de l’impérialisme. Durant cette période, l’écrivain en général était en accord avec la poussée anti-impérialiste de la lutte du peuple. L’ennemi apparaissait clairement. Le racisme du colon garantissait cette clarté. La couleur de la peau marquait la limite entre le colonisateur et le colonisé. Même les collaborateurs africains du régime – les Buthélezi du Kenya colonial – étaient touchés par le racisme. L’artiste oral était en première ligne; il articule les sentiments anti-coloniaux du peuple kenyan. Adaptées aux besoins de la lutte, les chansons et la poésie de la tradition orale de la paysannerie devinrent un moyen très puissant de rassembler les gens contre les colonialistes. Avec l’indépendance, en 1963, l’impérialisme au Kenya changea simplement d’apparence. Il prend alors la forme d’un arrangement néo-colonial. Aujourd’hui, au Kenya, les plus grandes institutions de banques et de finance sont la propriété des monopoles occidentaux. La plupart des industries et du gros commerce sont entre les mains des États-Unis et des transnationales occidentales. L’économie du Kenya est, comme vous pouvez le voir, une succursale de l’impérialisme occidental. Mais la classe dirigeante visible n’est pas une bourgeoisie internationale. Elle est kenyane. Elle est visiblement africaine. Mais c’est une bourgeoisie compradore locale contrôlant les rouages de l’État au nom de l’impérialisme. Et comme SON équivalent, le colon, cette classe est devenue très répressive. Dans le Kenya néo-colonial, il n’y a pas d’uniformité, pour ce qui concerne l’écrivain. Il y a aujourd’hui des écrivains et des artistes qui sont du côté de la machine d’État, de la répression coloniale. Mais il y en a d’autres – et heureusement la majorité – qui essaient d’articuler le cri du peuple. La responsabilité de l’écrivain progressiste dans un État néo-colonial est d’autant plus difficile qu’une vision claire, de qui est ennemi ou qui ne l’est pas, est troublée par l’uniformité de la couleur entre dirigeants et dirigés. Mais pour qu’un tel écrivain soit efficace, il/elle doit être conscient, qu’un tel écrivain soit efficace, il/elle doit être encore plus conscient du rapport des forces sur la scène nationale et internationale. Tout comme la question de la célébrité. Je crois absolument et sans aucune honte à l’alliance entre paysans kenyans et classe ouvrière dans la lutte pour créer réellement un nouveau Kenya. Ils ont affronté le colonialisme britannique et l’ont forcé à la retraite. En tant qu’écrivain, j’ai toujours essayé d’exprimer cette position d’alliance de façon aussi efficace que possible dans mes limites en tant qu’artiste. Les écrivains progressistes doivent particulièrement faire attention à la forme. Si je crois en une chose, je veux la transmettre de façon la plus convaincante. Je crois que le pouvoir, la beauté et le courage, l’héroïsme et la véritable humanité sont du côté de ceux qui luttent pour changer les forces sociales qui déforment l’humanité. Une partie de la responsabilité de l’artiste progressiste est de trouver le langage approprié avec lequel exprimer les sentiments du peuple. Un écrivain ne doit pas écrire avec pour objectif la célébrité ou la reconnaissance internationale ».

– Sur un réactionnaire peut-il être un bon écrivain : « Difficilement. On peut être capable de manier des mots mais qui expriment une vision du monde qui renforce les forces réactionnaires. En littérature, il y a de nombreux exemples. Mais ce ne sont pas forcément de bons écrivains et de grands artistes. Oui, ils peuvent utiliser des mots, ils peuvent raconter des histoires avec une fin inattendue ou qui garde le lecteur pendu au bout de la plume de l’écrivain. Mais à la fin, le mensonge qu’ils essaient d’exprimer vient miner leur efficacité en tant qu’artistes du théâtre de l’âme humaine. Les écrivains qui impressionnent le plus comme artistes créatifs, démontrent une force même lorsqu’il y a contradiction dans leur œuvre car ils ne glissent pas sur les contradictions réelles au cœur de notre être social. Certaines tendances dans leur œuvre peuvent être rétrogrades mais pour le principal le poids de leur sympathie en tant qu’écrivains est du côté de la liberté humaine et du progrès. Ben, je ne sais pas grand-chose sur Kipling mais je dirais que certaines de ses poésies et histoires ne sont vivantes que lorsque malgré ses sympathies pour l’impérialisme, elles expriment les contradictions de l’Impérialisme. Prenez un écrivain comme Tolstoï. Certaines tendances de sa vision sont rétrogrades mais le poids de sympathie humaine dans ses nouvelles est en faveur de la paysannerie. Ou un écrivain apparemment très réactionnaire comme Dostoïevski, il se place du côté de la souffrance humaine, de l’immense besoin d’y mettre fin. L’artiste a la capacité de réfléchir sur le monde dans lequel il vit, comme un miroir. On peut dire qu’un écrivain est bon ou mauvais dans la mesure où il ou elle est capable de réfléchir effectivement ce monde avec toutes ses contradictions, quelle que soit l’idéologie consciente de ce ou cette artiste, de réfléchir une certaine réalité, disons de la vie, avec toutes les contradictions. Mais l’autre côté de la pièce, c’est qu’en réfléchissant sur le monde, un écrivain exprime aussi une attitude envers le monde. Dans la situation, disons d’impérialisme et de lutte anti-impérialiste, il ou elle prend une position à l’égard de l’une ou l’autre. Parfois, il peut y avoir des contradictions entre le réalisme social de l’image, d’un côté, et le poids et les sympathies ou les attitudes conscientes envers ce qui est reflété. Il peut y avoir une divergence apparente ».


– Sur la dialectique entre ancienne et nouvelle éthique et esthétique : « Il y a toujours une nouvelle esthétique dans le sens que les sources de la vie sont là en permanence. Mais dans certaines situations, il y a une lutte entre la nouvelle esthétique et l’ancienne. Le système d’apartheid, par exemple, porte en lui l’esthétique d’un monde agonisant. d’un monde mort, un système social putréfié, qui ne peut vous inspirer que du dégoût. Ceux qui combattent en Afrique du Sud portent dans leur lutte les germes d’une nouvelle esthétique. La nouvelle esthétique et l’ancienne sont finalement en lutte et ce que l’on veut vraiment voir dans les œuvres d’art c’est la beauté de la résistance, car il y a une infinie beauté dans la résistance. Dans une situation coloniale, la lutte de libération nationale est la base du développement d’une nouvelle éthique ou esthétique. Le concept de la création de l’homme nouveau ou la femme nouvelle en nous contient la nouvelle éthique ou esthétique. Il n’y a pas un divorce total avec l’ancienne. La nouvelle société se crée à partir de l’ancienne, naît de la lutte contre l’ancienne. La nouvelle éthique se construit à partir du processus historique. Les gens créent dans la lutte, ils élèvent l’esthétique ou l’éthique progressiste à un niveau supérieur, tout comme eux-mêmes s’élèvent à un nouveau niveau de conscience en tant qu’êtres humains ».

Sur les langues nationales et la littérature : «  La question de la langue dans la littérature africaine doit être considérée dans un contexte historique. Nous devons partir de la langue de la paysannerie et de la classe ouvrière en Afrique. Les langues africaines sont utilisées par la majorité des nationalités du continent et les langues des peuples doivent être notre point de départ. Je considère comme une limite le fait de ne pas intervenir auprès des gens dans leur propre langue, celle qu’ils parlent et utilisent. C’est pourquoi, après avoir travaillé avec des paysans à Kamirihu, à Limuru en 1977, dans des langues qu’ils pouvaient comprendre et donc permettant de développer un nouveau type de théâtre avec un nouveau type d’impact qui reflétait leur condition en tant qu’ouvriers agricoles, je pense que je ne peux plus revenir en arrière. Une fois mes yeux ouverts, il m’était impossible de revenir à l’ancienne situation où j’étais prisonnier de la langue anglaise. Je me sens libéré car je peux écrire dans mes langues: mes nouvelles peuvent être lues par les ouvriers qui comprennent ces langues. Ce travail peut être traduit dans d’autres langues africaines si nécessaire, et en anglais, russe, allemand, japonais et être à la disposition de n’importe quel autre peuple du monde. Je me sens donc libre, libéré et pour la première fois, je sens qu’en tant qu’écrivain j’ai obtenu mon audience, ma relation avec mon audience de classe est d’une certaine manière complète. Bien sûr, cela n’est pas sans conséquence. Je peux donner deux exemples récents. J’ai été placé en détention politique de 1977 à 1978, précisément parce que je m’engageais dans un théâtre progressiste dans une langue que mon peuple pouvait comprendre et donc avait la possibilité de débattre de questions de libération et de concepts par lesquels les gens pouvaient comprendre une situation et la combattre. Après ma mise en liberté, je suis resté au Kenya quelque temps, mais tout travail me fut interdit et finalement je fus forcé à l’exil. Cela fait cinq ans que je vis ici à Londres. Ironiquement, le fait de vivre en exil en Grande-Bretagne m’a rendu encore plus sensible au problème de la langue et c’est pourquoi j’ai récemment écrit un livre intitulé -Decolonising The Mind (Décoloniser l’esprit), qui pose toute la question de la langue dans la littérature africaine. Le problème d’être en exil est que l’on se trouve loin des bases matérielles de son imagination. On a besoin d’être dans ce bus, d’entendre cette phrase prononcée par une personne qui se dispute ou rit ou n’importe quoi d’autre. On a besoin d’être près d’une usine pour entendre ces petites choses qui permettent à l’imagination de démarrer. Ces images que l’on rencontre lorsqu’on se promène, ces gestes, ce rire, tout cela vous manque lorsque vous êtes en exil. Si vous utilisez une certaine langue, il vous manque une situation avec laquelle vous intervenez avec une nouvelle évolution dans cette langue, etc. Quoi qu’il en soit. ici en exil, j’ai écrit une nouvelle en Kikuyu, Matigari Ma Njiruungi. C’est difficile à traduire en anglais. Cela signifie quelque chose comme ceux qui survivent aux balles, les patriotes qui survivent à la lutte de libération mais dans un sens aussi ceux qui continuent cette lutte. Je l’ai écrite en 1983 mais elle a été publiée en octobre 1986 en langue Kikuyu. En février 1987, il y a eu une opération du gouvernement contre elle ! La branche spéciale, c’est-à-dire la police politique du Kenya, est allée dans toutes les librairies et a saisi les copies. Ils sont aussi allés chez l’éditeur avec un camion et ont chargé tous les livres en stock. La nouvelle écrite en Kikuyu en exil en Grande-Bretagne ne peut donc être vendue au Kenya. Mais mes nouvelles en langue anglaise sont vendues, et je considère donc cette question de langue comme très importante pour moi ».

A sa famille éplorée et à l’ensemble des écrivains qu’il a inspiré, nous adressons nos condoléances.

31/05/25