À l’occasion de l’inauguration de la place Alé Gaye Diop, prévue pour le mercredi prochain à Rufisque. Un événement qui revêt une grande importance, non seulement pour la ville, mais aussi pour notre mémoire collective, je fais un rappel.

Après un échange enrichissant avec Madame Isseu Touré, Directrice de la Planification de la Ville, j’ai appris que la ville allait honorer la mémoire de ce personnage emblématique. Un événement qui, selon moi, ne doit pas se contenter d’être une simple inauguration, mais plutôt l’occasion de rappeler une histoire souvent oubliée et mal perçue par une certaine opinion, mais qui mérite d’être redécouverte et partagée avec fierté.

Alé Gaye Diop, loin d’être une figure ordinaire, s’inscrit dans l’histoire de notre pays comme un symbole de résistance à l’oppression coloniale. Entrepreneur de talent et passionné de courses hippiques, Alé Gaye Diop a défié un système colonial qui voyait en lui une véritable menace de l’économiecoloniale. Il ne s’agissait pas seulement de sa réussite dans les affaires, mais aussi de la manière dont son activité de turfiste et de propriétaire de chevaux de course a posé un problème aux colonisateurs de l’époque.

Dans un contexte où l’économie coloniale reposait en grande partie sur l’exploitation des ressources et l’assujettissement des populations locales, la réussite d’un homme comme Alé Gaye Diop était perçue comme un véritable ennemi. Ses chevaux, issus d’un travail acharné, coïncidant au déclin du commerce de l’arachide, étaient souvent plus rapides et plus performants que ceux des colons. Une victoire d’une de ses juments, lui fut fatale. En réalité, la jument d’Alé Gaye devançait celles des colonisateurs sur les hippodromes, fut un affront direct à l’autorité coloniale. C’était là, à mon sens, bien plus qu’une compétition sportive : c’était un combat symbolique pour l’indépendance, pour la dignité et pour la reconnaissance de la compétence locale face à un système oppressif.

À travers ce personnage, dans mon roman : L’Autre et Moi, j’ai voulu rappeler cette lutte,, représentée par Alé Gaye Diop. À travers le personnage d’Omar Fall, qui fait écho à son parcours, Comprendre que la lutte pour la dignité ne se résume pas simplement à la résistance armée, mais aussi à la lutte économique, à la valorisation de notre savoir-faire et de nos ressources. Omar Fall, bien que fictif, incarne cette même détermination et cet engagement contre un système colonial qui se pensait invincible. Alé Gaye Diop, à travers ses chevaux, incarne cette résistance pacifique mais déterminée, qui visait à prouver que l’Afrique n’était pas simplement un terrain d’exploitation, mais un terreau fertile pour la réussite et l’indépendance.

L’inauguration de la place Alé Gaye Diop est l’occasion de remettre en lumière cette histoire. C’est un moyen de rappeler à tous les Rufisquois, mais aussi à l’ensemble des Sénégalais, que l’histoire de notre pays est faite de ces résistances, de ces combats invisibles mais essentiels. Cette place, en son honneur, n’est pas seulement un espace urbain, c’est un monument de mémoire, un lieu qui doit nous rappeler que la lutte pour la dignité, la liberté et la reconnaissance se fait à tous les niveaux. Et que la victoire sur l’oppression ne se mesure pas seulement par des armes, mais aussi par les réussites économiques et culturelles.

Je tiens à souligner que cette mémoire n’est pas seulement une question de patrimoine historique, mais aussi une leçon pour les générations futures. Alé Gaye Diop, en tant qu’entrepreneur turfiste, a su montrer que la réussite ne dépend pas des forces extérieures, mais de la force intérieure, de la détermination et du travail acharné. C’est ce message que nous devons transmettre, à travers cette inauguration, à nos jeunes, afin qu’ils prennent conscience de la valeur de leur histoire et de leur héritage de la Vieille Ville De Rufisque.

Rufisque, en honorant aujourd’hui Alé Gaye Diop, rend justice à un homme qui a, par son engagement, contribué à l’affirmation de notre identité et de notre indépendance. Que cette place devienne un lieu de rassemblement et de réflexion pour tous ceux qui croient en la justice, en la vérité et en la dignité humaine.

… je vous invite à vous souvenir que derrière ce nom, derrière cette place, il y a l’histoire d’un combat, d’une résistance et d’une victoire. Que l’héritage d’Alé Gaye Diop, à travers cette inauguration, continue d’éclairer notre chemin et nous inspire dans notre quête collective de justice et de reconnaissance.

Merci au Maire Oumar Cisse, d’avoir pris en compte mes suggestions !

Ismaïla Niang