
Il n’était pas prévu dans la course. Il n’était même pas inscrit. Mais c’est lui qui finit au centre de toutes les attentions. Ameth Ndiaye, ou plutôt celui qui a emprunté son nom, son dossard et sa place, devient malgré tout le héros d’un jour, acclamé, moqué, partagé. Une célébrité par effraction. Une gloire par escroquerie.
Cette affaire, aussi burlesque qu’instructive, est un condensé de notre époque : le culte du buzz, la glorification de la médiocrité, l’apologie du faux-semblant. Le Sénégal du réew dans toute sa splendeur, où l’on célèbre plus souvent l’astuce que le mérite, le bruyant que le brillant.
Dans cette République en récréation permanente, les bons élèves sont souvent relégués, pendant que les tricheurs deviennent des vedettes. On ne demande pas d’avoir du fond ou de la moralité : il suffit de faire rire, choquer ou émouvoir pour régner sur la cour de récré. Même l’âne, récalcitrant et imprévisible, devient une métaphore de notre société : émotive, stagnante, hésitante, imprévisible… et parfois en grève de bon sens.
Ce fait divers en dit long sur notre époque : celle où l’effet miroir de l’absurde révèle des vérités profondes sur nos normes sociales. Une société où l’on s’invente une place, et où l’on finit parfois célébré pour ne pas avoir bougé.
Docteur Cheikh Tidiane MBAYE,
Sociologue