Dans Destins antinomiques, Daouda Djiba orchestre une méditation littéraire sur la dialectique entre modernité et tradition, révélant les strates complexes d’un héritage culturel sénégalais où se conjuguent mysticisme et foi. Issu d’un parcours marqué par l’école coranique et l’univers énigmatique d’un cimetière aux allures sylvestres, l’auteur érige en fil d’Ariane la quête identitaire d’Alamine, figure à la fois énigmatique et emblématique. Dans cet entretien, Djiba dévoile comment son vécu, imbibé de spiritualité et de traditions ancestrales, nourrit une écriture résolument symbolique et intensément chargée de sens. Il nous convie ainsi à repenser la coexistence harmonieuse de croyances apparemment antagonistes, tout en affirmant la place prééminente de la littérature sénégalaise sur la scène africaine et internationale, héritière d’un flambeau d’excellence transmis par ses prédécesseurs.

Propos recueillis par Babacar Korjo Ndiaye

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1.Quelles sont les influences de votre parcours personnel sur votre écriture et vos choix thématiques ?  

Mon parcours personnel a fortement influencé mon écriture et le choix de mes thématiques. Déjà petit, j’ai d’abord été  à l’école coranique et tout mon cursus durant j’ai allié études coraniques et enseignement classique en plus d’avoir habité tout ce temps entre un lieu de culte et un cimetière à l’apparence d’une forêt.

Vous comprendrez donc pourquoi je peins d’une certaine manière mon personnage principal.

2. Destins antinomiques mêle magie noire et traditions ancestrales. Qu’est-ce qui vous a inspiré à intégrer ces éléments dans votre récit ?  

Magie noire je ne dirais pas, mysticisme et traditions ancestrales oui. Ce qui m’a incité à intégrer ces éléments dans mon récit c’est cette volonté sensibiliser en rappelant l’importance de la culture dans notre réalité actuelle.

La culture est notre identité, c’est ce qui nous définit, c’est ce qui nous distingue des autres et c’est la mémoire de nos valeurs.

3.Le personnage d’Alamine est au cœur de votre roman. Quelle est sa quête et pourquoi avez-vous choisi de la rendre aussi intense ?  

La symbolique du nom en elle même répond à la question: « celui qui est digne de confiance ». Sa quête est une quête d’identité: l’école coranique, ses origines, les traditions de ses ancêtres, tant de passages pour s’accomplir. Le choix de l’intensité est purement artistique et c’était ma manière de faire vivre l’histoire à mes lecteurs.

4. Vous parlez de la tension entre culture islamique et croyances ancestrales. Comment cette dualité façonne-t-elle l’identité de vos personnages?

Cette dualité complète mes personnages: Alamine, un hafizz qui a eu l’approbation des ancêtres; Halima, une fille avec un fort ancrage religieux qui pourtant a accueilli les rites de ses ancêtres…

La tension entre religion et croyances ancestrales n’est qu’un leurre. Nous avons posé le sujet pour faire comprendre que les deux cohabitent aux Senegal sans s’exclure: l’exemple de Yoff est éloquent, le Ndeup y est encore pratiqué et pourtant c’est la communauté qui accueille l’un des plus grands événements religieux au Sénégal « l’Appel de Seydina Limamou (RTA) »

5. Quelle est, selon vous, la place de la littérature sénégalaise dans le paysage littéraire africain et mondial aujourd’hui ?

Dans le paysage littéraire africain, la littérature sénégalaise a une place de choix tant à l’écrit qu’à l’Oral et sur le plan international nous nous sommes toujours distingué. 

J’espère vivement que les générations à venir porteront haut ce flambeau de l’excellence entretenu par nos devanciers.