Il y a quelques semaines, j’ai installé une intelligence artificielle. Par curiosité, j’ai commencé à échanger avec elle. Puis j’ai voulu tester un truc qui secoue la toile : je lui ai soumis un de mes textes, en lui demandant de le peaufiner.

Le résultat était bluffant. Magnifique, même. Pas exactement comme je l’aurais écrit, mais presque… Ce que mon bêta-lecteur ou correcteur met des heures à réajuster, la machine l’a pondu en quelques secondes… GRATUITEMENT !

Alors… satisfaction ? Pas du tout.

J’ai eu peur. Mon cœur s’est mis à cogner. Pas seulement parce que le métier de mon bêta-lecteur venait d’être bousculé, mais parce que ma propre légitimité semblait soudain fragile.

Et si, demain, on me reprochait d’écrire « trop bien » pour un AUTODIDACTE ? De trouver les bons mots, les bonnes tournures… Alors que c’était justement ça, le rôle de l’écrivain autrefois : chercher, raturer, recommencer, pour atteindre la justesse, la beauté.

Bienvenue dans un monde où l’on doit volontairement laisser des fautes, des maladresses, des hésitations… pour être crédible. C’est absurde, triste. On nous pousse à nous saboter nous-mêmes !

Ce post n’est pas une plainte. Je n’ai encore jamais reçu ce genre de reproche. Peut-être parce que beaucoup de mes lecteurs m’ont vu grandir, mûrir, évoluer ici, bien avant l’ère de l’IA. Ce sont eux qui m’ont aidé à cette « petite réussite », à force de commentaires, de corrections, de partages.

Mais aujourd’hui, je me dois d’en parler. Pour appeler à plus de vigilance, de nuance, de compréhension. Notamment du côté des éditeurs, des producteurs, des lecteurs professionnels, que je respecte profondément, et dont l’œil exercé sait reconnaître une plume sincère, une écriture d’âme.

Certains trouveront ma position extrême. Mais ils ne savent peut-être pas ce que ça fait de quitter un emploi depuis des années, de se consacrer corps et âme à la plume, à apprendre à rédiger un commentaire, un mail professionnel… Pour qu’au final, on te dise :

– Il faudrait écrire un peu plus mal, pour que ce soit crédible.

C’est injuste ! Je n’adhérerai jamais à l’idée de l’implication de l’IA dans le monde artistique : l’écriture, l’interprétation, la voix off, le scénario, la calligraphie… Non, jamais ! Ces métiers sont trop sacrés pour être confiés à une machine.

J’espère de tout cœur que les grands acteurs du secteur se lèveront pour protéger cet espace sacré.
Pour, à défaut de l’éradiquer, poser des limites claires :

Oui, l’IA peut aider à analyser. À générer des idées, peut-être. Mais pas à écrire. Pas à insuffler une âme à un texte, à une image.

Et si vous ne me voyez plus écrire, comme ces dernières semaines, c’est parce que je me suis tourné, définitivement peut-être, vers le cinéma, vers la réalisation. Un monde qui, certes, n’est pas totalement épargné… Mais où il reste encore des endroits où l’humain est irremplaçable. En tout cas… pour deux ou trois années encore.

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N’hésitez pas à partager vos avis et faire voyager ce cri. Peut-être qu’ensemble, on préservera encore un peu la voix des âmes contre celle des algorithmes.

— Boubacar Sedikh Diallo, écrivain et scénariste autodidacte.

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