Par Adama Samaké
Moyen de communication, l’écriture est intrinsèquement liée à la parole et à la pensée. Car elle se veut une mise en forme de celles-ci par des signes conventionnels. Or toute parole, toute pensée, selon Dominique Zahan est force vitale, parce qu’elle se fonde sur un germe générateur. Aussi, l’écriture qui suppose le style est-elle la communauté des évidences transposées en formes, en thèmes, en images et les modifications langagières sont des modifications du statut du sujet (Julia Kristeva).
Par conséquent, toute écriture est un discours. Ce dernier, en lui-même, est un concept polysémique. A ce titre, il revêt plusieurs formes. Cependant, Moustapha Fall précise que «Tout discours est au sujet de quelque chose ou de quelqu’un que ce discours lui-même prétend exprimer ou représenter ». Tout discours a donc un contenu sémantique et une forme d’expression particulière. Son analyse impose alors l’étude des formes d’organisation lexico-sémantiques et syntaxiques ; c’est-à-dire les discours linguistique, narratif et idéologique. Car elle implique l’étude du bien dire et du beau dire.
Il en résulte que l’analyse de l’écriture et du discours revient à celle de l’esthétique qui, selon R.P Mveng « a pour objet les normes du Beau telles qu’elles s’expriment à travers les œuvres. Son domaine embrasse donc la totalité des expressions artistiques et littéraires (…). En fait, le problème esthétique est fondamentalement le problème de la créativité. Ce n’est pas un problème de définition, de discernement, d’identification et d’appréciation d’une œuvre ; c’est un problème d’identité culturelle ». L’esthétisation est, au demeurant, un fait idéologique.
On comprend, dès lors, pourquoi selon les théories sociologiques, la littérature est un processus de réappropriation de l’Histoire qui suppose un désir profond d’émancipation. Elle y participe, parce qu’elle a pour quintessence le mouvement des idées. La littérature est alors un fait social, une institution. Car elle est à la fois « organisation autonome, système socialisateur et appareil idéologique ». De ce point de vue, elle se détermine comme une vaste enquête anthropologique. En d’autres termes, elle est une science humaine. Aussi, l’œuvre littéraire véhicule-t-elle un projet socio idéologique extra textuel. C’est pourquoi, elle peut être considérée comme une vision d’une communauté sociale déterminée.
Ainsi, l’œuvre littéraire, dans son fonctionnement intrinsèque, se trouve étroitement liée à son auteur et à sa société. Roland Barthes affirme, à juste titre, dans « Le dégré zéro de l’écriture »:
L’ écriture « est une fonction : elle est le rapport entre la création et la société, elle est le langage littéraire transformé par sa destination sociale. Elle est la forme saisie dans son intention humaine et liée ainsi aux grandes crises de l’histoire. (…) Placée au cœur de la problématique littéraire qui ne commence qu’avec elle, l’écriture est donc essentiellement la morale de la forme, c’est un choix de l’aire sociale au sein de laquelle l’écrivain décide de situer la nature de son langage ».