
Au Sénégal, la presse écrite, bien qu’indispensable au débat démocratique, dissimule une réalité d’exploitation de ses journalistes. Absence de contrats, salaires irréguliers et conditions de travail précaires : ces travailleurs de l’information vivent une situation de plus en plus alarmante.
Précarité et insécurité professionnelle
Un rapport du Conseil pour le Respect de l’Éthique et de la Déontologie dans les Médias (CRED) de 2021 révèle qu’environ 70 % des journalistes de la presse écrite n’ont pas de contrat formel, les exposant à une insécurité totale. « Beaucoup sont rémunérés à la tâche, ce qui fragilise leur indépendance », déplore Bamba Kassé, ancien secrétaire général du Syndicat des Professionnels de l’Information et de la Communication du Sénégal (Synpics).
Des droits bafoués
Le Code de la Presse (Loi n° 2017-27 du 13 juillet 2017) prévoit pourtant des protections légales pour les journalistes, notamment le droit à un contrat de travail conforme et le respect de leur dignité. Mais sur le terrain, ces droits sont souvent ignorés. Fama Touré, une journaliste locale, raconte : « Il m’a fallu deux ans pour obtenir un salaire fixe. Avant cela, je n’étais payée que si mon article était publié. » Cette situation génère des effets négatifs sur la qualité de l’information et sur l’éthique professionnelle. Le sociologue Mamadou Ndiaye souligne : « Un journaliste qui craint pour son avenir financier a du mal à exercer en toute indépendance ».
Des appels à la réforme
Pour remédier à cette crise, Bamba Kassé plaide pour une réforme du secteur et propose la création d’un Fonds d’appui aux journalistes, distinct des aides aux entreprises de médias. « Un journaliste doit pouvoir vivre décemment de sa plume », affirme-t-il.
Conclusion
L’exploitation des journalistes menace non seulement leur dignité, mais aussi la qualité de l’information, affectant ainsi la démocratie. Comme l’a rappelé Norbert Zongo : « Un peuple sans journalistes libres est un peuple sans conscience ». Protéger les journalistes, c’est préserver la liberté de l’information.
imam chroniqueur Babacar Diop