par Sandrine Lemare

L’avènement du numérique a engendré une transformation profonde dans nos sociétés, affectant de nombreux aspects de nos vies. L’une des évolutions les plus marquantes est la digitalisation des humanités, où la technologie redéfinit la manière dont nous interagissons avec la culture, les sciences sociales, l’éducation et les arts. Cette digitalisation n’est pas simplement une adaptation technologique, mais une révolution socioculturelle, ayant des répercussions étendues sur nos perceptions, nos comportements et nos interactions sociales.

Seulement au Sénégal nous n’avons pas encore posé ce débat, il semble même que nous n’en n’ayons pas encore pris conscience. Et pour cause le digital est arrivé dans nos vies sans que nous n’y soyons réellement préparé. C’est notamment ce qui créait aujourd’hui un véritable fossé entre les générations, car il est évident que nous n’avons plus le même langage  et avons de moins en moins de références transmises et partagées.

La digitalisation des humanités a créé un vaste espace en ligne où la culture est partagée, créée et discutée.  Mais de quelle culture s’agit-il ? une culture imposée, mondialisée souvent très loin de nos réalités quotidiennes.

Seulement, c’est cette culture mondialisée qui influencent aujourd’hui notre jeunesse et l’invite à se détacher de ce qu’elle est réellement, poussant certains à avoir des attitudes, des comportements et pratiques loin des valeurs culturelles endogènes au cœur de notre vivre ensemble.

Les réseaux sociaux, les plateformes de partage de contenus et les communautés en ligne ont ouvert de nouvelles avenues pour l’expression. Cependant, cela soulève des questions sur l’authenticité culturelle et la manière dont l’identité individuelle est influencée par cette culture numérique. Les interactions en ligne redéfinissent les frontières traditionnelles de l’identité, créant des identités multiples et complexes dans le monde virtuel.

La digitalisation a aussi révolutionné les pratiques éducatives et de recherche, facilitant l’accès à une quantité immense d’informations et de ressources. Les plateformes d’apprentissage en ligne, les bibliothèques numériques et les bases de données permettent une recherche plus rapide et approfondie. Cependant, cela pose la question de la qualité et de la crédibilité de l’information, ainsi que des inégalités d’accès à ces ressources notamment sur le continent africain. L’éducation en ligne change également les paradigmes pédagogiques, mettant l’accent sur l’auto-apprentissage, la collaboration et la diversité des perspectives.

Au Sénégal l’Education numérique commence tout juste à être formalisée et enseignée. Cette éducation n’est pas encore accessible à tous car elle demande dans un premier temps de former un corps enseignant averti et agile car le mouvement est la caractéristique première du numérique perpétuellement en évolution. A cela s’ajoute la nécessité de repenser nos modèles et modalités d’éducation en adéquation avec les profils des apprenants Génération Z et Alpha.

Aujourd’hui une véritable réforme de l’Education s’impose, aussi bien sur la forme que sur le fond, pour permettre à notre jeunesse d’être en mesure de révéler son potentiel dans ce monde VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity et Ambiguity) . Il nous semble aujourd’hui évident que l’enseignement semble se jouer « hors les murs » pour permettre aux jeunes de développer au-delà des savoirs académiques des compétences humaines et numériques qui leur permettront de se déployer et d’impacter positivement dans le monde.

La digitalisation soulève aussi des préoccupations éthiques majeures, notamment en ce qui concerne la vie privée et la sécurité des données. Nos interactions en ligne génèrent un flux constant de données personnelles, souvent exploitées à des fins commerciales ou politiques. La nécessité d’une réglementation adéquate pour protéger les individus contre les abus numériques et pour garantir l’intégrité de nos sociétés est plus pressante que jamais.

La digitalisation des humanités est une réalité incontournable. Pour prospérer dans ce monde numérique en constante évolution, nous devons nous adapter et développer des compétences numériques tout en restant critiques vis-à-vis de ces changements. L’équilibre entre l’exploitation des avantages de la digitalisation et la préservation de nos valeurs sociales et culturelles est une tâche complexe, mais essentielle pour une société numérique responsable et équilibrée respectant les fondamentaux culturelles de chaque société.

Si nous n’y prêtons pas une attention particulière hélas nous retomberons dans les méandres d’une nouvelle ère coloniale. Afin d’éviter de nouvelles blessures sur des plaies qui n’ont pas encore totalement cicatrisées une déconnexion du digital s’impose pour une reconnexion à notre humanité.

Réinitialisons-nous ! partageons nos réflexions et agissons pour un usage du numérique qui ne nous éloigne pas de ce que nous sommes :  Humains ; un usage numérique qui permettent à tous de jouer sa partition dans ce monde en mouvement sans se perdre dans de nouvelles formes de domination …

Pour en savoir plus sur le projet Réinitialisons nous ! suivez-nous ici : https://lnkd.in/ga2aPyN9

Franco-sénégalaise, Sandrine Lemare est sociologue spécialisée en psychologie sociale et en sciences politiques, engagée depuis plus de 20 ans dans la conception et la mise en œuvre de programmes éducatifs innovants, centrés sur l’humain et adaptés aux défis contemporains.