
Par Josué Guébo
« Lorsque j’entends parler bien de mes amis, au sujet du rapport des Africains aux religions dites révélées, je suis frappé par la candeur de leur argumentaire. Leur posture tient généralement en un postulat des plus amusants : un africain ne peut avoir lu Cheick Anta Diop sans défendre systématiquement toutes les positions du savant sénégalais. Cette manière de penser est estudiantine, pour m’en tenir à ce mot. Il faut en sortir. Il y a une vie après l’université. Anta Diop a dit des choses intéressantes, il a déconstruit des thèses qui relevaient de la stricte filouterie conceptuelle, et pour cela l’on ne peut que le saluer et lui adresser les plus grandes expressions d’admiration.
Mais Anta Diop n’est pas le seul à avoir dénoncé la criminalité par laquelle de grands bandits comme Montesquieu, Voltaire ou Paul Broca ont tenté de faire du Noir un sous-homme. Un savant caucasien comme Stephen Jay Gould (The Mismeasure of Man, Norton, 1981) a œuvré efficacement lui aussi sur le front de la réhabilitation de tous les hommes.
Par ailleurs, il me semble qu’Anta Diop n’avait pas le projet d’être le gourou d’une secte de borgnes respirant par l’adrénaline et la mélanine. Il luttait, me semble-t-il pour l’égalité des hommes. C’est pourquoi, au nom du bon sens le plus élémentaire, je récuse la posture qui voudrait faire d’une race, la race par excellence. J’ai récusé la thèse d’une supériorité blanche et je ne vois pas pourquoi, j’acclamerais aujourd’hui celle d’un noirisme totalitaire. Les hommes, à mes yeux, se valent. Les races ne sont que des réalités secondaires au regard de ce que me semble être fondamentalement l’homme. Au nom de la science, je refuse d’être un raciste à rebours…. »
Chroniques africaines et aphorismes, Dh art Edutions, Longueuil, 2018