Les 14 et 15 juin 2025, la commune historique de Diakhao Sine a accueilli un séminaire de haute portée intellectuelle et symbolique, organisé par la Convention nationale des écrivains et éditeurs du Sénégal (CONEES). Ce rendez-vous a réuni écrivains, éditeurs, journalistes, universitaires et passionnés de la chose littéraire, tous rassemblés autour d’une cause commune : repenser le devenir du livre et de la lecture au Sénégal.

La rencontre, placée sous le patronage du Bour Sine, a été solennellement ouverte par ce dernier, qui a salué la pertinence d’une telle initiative dans un contexte de renouveau culturel et éducatif. Par sa présence, il a conféré à l’événement un cachet particulier, rappelant la tradition lettrée et la profondeur historique du Sine dans les dynamiques intellectuelles du pays.

Un bilan porteur d’espoir

Dans son discours introductif, M. Pape Samba Badji, président de la CONEES, a tenu à exprimer sa satisfaction devant l’engagement constant des membres de la structure. Il est revenu sur les acquis de la rencontre de Guédiawaye du 28 octobre 2023, dont les conclusions avaient permis de dresser un état des lieux critique mais constructif de la littérature sénégalaise et de son rôle dans le développement économique, culturel et politique du pays.

Ce document de synthèse avait d’ailleurs été remis aux candidats à l’élection présidentielle de février 2024. Aujourd’hui, a-t-il souligné avec optimisme, plusieurs des recommandations de la CONEES ont été intégrées dans le projet « Sénégal Horizon 2050 », témoignant de l’écoute nouvelle des autorités à l’égard des acteurs culturels. M. Badji a également annoncé l’intention du Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye d’organiser un Forum national du livre, événement d’envergure auquel la rencontre de Diakhao fait office de prélude stratégique.

Souveraineté éditoriale et dynamique des auteurs

Prenant la parole à son tour, le secrétaire général Waly Ndour a axé son intervention sur la nécessité impérieuse pour le Sénégal de recouvrer une souveraineté éditoriale, c’est-à-dire la capacité de créer, produire et diffuser ses propres œuvres dans une logique d’émancipation culturelle.

Deux ateliers de réflexion ont structuré les travaux du séminaire :

1. Atelier « Livre et lecture »

Ce premier groupe a abordé des questions cruciales : la production littéraire nationale, la reconnaissance des langues nationales dans l’écriture, le circuit de distribution, la visibilité des ouvrages et leur référencement. Il est unanimement ressorti que seule une politique volontariste en faveur d’une souveraineté éditoriale peut garantir l’indépendance culturelle du Sénégal. L’idée d’un maillage éditorial endogène fort, soutenu par l’État et les collectivités, a été largement saluée.

2. Atelier « Les Auteurs »

Le second atelier s’est penché sur la situation des écrivains. Plusieurs défis y ont été identifiés : absence de reconnaissance sociale, précarité économique, accès limité à la protection sociale, visibilité médiatique insuffisante, absence de régulation claire du secteur, et manque de soutien public à la création. Les échanges ont abouti à une série de propositions fortes en faveur d’un environnement littéraire plus juste, plus structuré et davantage intégré aux politiques culturelles nationales.

Vers un avenir du livre sénégalais

À l’issue de cette rencontre, les participants ont exprimé une volonté commune de porter la voix de la littérature sénégalaise dans les arènes publiques, et de faire du livre un levier de transformation sociale, culturelle et intellectuelle. La tenue prochaine du Forum national du livre représente, à cet égard, une formidable opportunité.

Le séminaire de Diakhao Sine, par la richesse de ses échanges et la qualité de ses propositions, constitue déjà une étape décisive dans la reconfiguration du paysage littéraire sénégalais, appelant à une mobilisation plus large, transversale, et ambitieuse. Un souffle nouveau semble s’élever du Sine, porteur d’espoir pour les lettres sénégalaises.

Babacar Korjo NDIAYE