
Le cinéma, lorsqu’il s’unit aux traditions, devient une passerelle entre le passé et le présent. Le dernier film du réalisateur français Étienne Delorme-Duc, centré sur la vie des pêcheurs de Saint-Louis, est une vibrante illustration de cet art de la rencontre. Plus qu’un simple récit documentaire, cette œuvre se distingue par sa profondeur symbolique et son hommage à la culture locale.
Le conteur international Zoumba y occupe un rôle central, incarnant la mémoire vivante d’un peuple et de ses croyances. Avec un conte inédit qui dialogue subtilement avec les réalités de la pêche et des eaux du fleuve Sénégal, Zoumba insuffle une dimension spirituelle au récit. Son style unique, à la fois captivant et empreint d’une sagesse ancestrale, confère au film une force narrative rare.
L’élément musical n’est pas en reste. Le chant « Maniwuli », hommage à la déesse des eaux, Maam Kumba Bang, transcende les frontières du visible. Ce précieux chant, recueilli auprès de la regrettée Adja Maïmouna Mbaye Issa Fall, appartient au registre ésotérique, enrichissant le film d’une aura mystique. La voix de feu Adja Maïmouna, portée par des mélodies envoûtantes, guide le spectateur dans une immersion onirique et poétique, où le fleuve devient un protagoniste à part entière.
Avec ce film, Delorme-Duc tisse une fresque où l’eau, les hommes, et leurs traditions se confondent dans un ballet presque sacré. L’onirisme qu’il insuffle à travers les contes de Zoumba et le chant « Maniwuli » fait écho à un profond respect pour la culture sénégalaise, faisant de cette œuvre bien plus qu’un simple hommage : un véritable voyage initiatique.
Au-delà des images, c’est une invitation à réécouter les voix du passé pour mieux comprendre les défis du présent. Une œuvre à ne pas manquer pour quiconque souhaite saisir l’âme de Saint-Louis et le murmure éternel de ses eaux.
Babacar Korjo Ndiaye